Dans cette affaire, la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail (CNESST) était saisie d’une plainte déposée par le travailleur en vertu de l’article 227 de la Loi sur la santé et sécurité du travail (LSST), lequel alléguait avoir subi une sanction, soit un congédiement, pour avoir exercé un droit de refus en raison des risques de contracter la Covid-19. La CNÉSST déclare cette plainte irrecevable et non fondée.
Les faits
Le plaignant est embauché par l’employeur le 7 avril 2020, à titre de commis de production dans la préparation et le montage de boîtes de repas à préparer livrées chez des clients. Compte tenu du contexte de pandémie de la Covid-19 et en raison de la situation sanitaire afférente, le plaignant est tenu de porter des équipements de protection, dont un masque trois plis, une visière, des gants, un sarrau, un filet à cheveux et à barbe, lorsque nécessaire, le tout fourni par l’employeur. De plus, ce dernier impose une prise de température corporelle quotidienne à tous les employés dès leur entrée au travail.
Le 15 avril 2020, lors de sa première assignation au montage des boîtes dans le réfrigérateur, le plaignant prétend se sentir en danger en raison de la possibilité d’attraper la Covid-19, et ce, malgré les mesures sanitaires mises en place. Plus spécifiquement, il allègue notamment que la distance requise de deux mètres entre les employés n’est pas toujours respectée, que certains employés retirent leur masque lorsque celui-ci devient humide, que les visières embuent en raison de la condensation. À sa demande, le plaignant est alors affecté à une autre équipe.
Le plaignant est congédié la même journée, et ce pour différents motifs soit : bris de la ligne de production, attitude insolente et retards fréquents.
Le lendemain, le plaignant dépose une plainte en vertu de l’article 227 de la LSST, prétendant avoir été congédié suivant l’exercice de son droit de refus de travail exercé en vertu de la LSST.
La décision
Dans sa décision, la CNÉSST rappelle d’abord les conditions qui doivent être remplies pour être en présence de l’exercice d’un droit de refus au sens de la LSST, soit :
- être un travailleur au sens de la LSST ;
- devoir exécuter à la demande de l’employeur un travail ;
- appréhender un danger résultant pour soi-même ou pour autrui de l’exécution de ce travail ;
- fonder cette appréhension sur des motifs raisonnables ;
- exercer ce droit de refus au sujet d’un travail dont les conditions ou circonstances d’exécution sont anormales ;
- pouvoir refuser d’exécuter le travail demandé sans mettre la sécurité d’autrui en péril immédiat ;
- rapporter le plus tôt possible à un représentant de l’employeur le droit de refus que l’on veut ainsi exercer.
De ces critères, la CNÉSST retient que le plaignant est un travailleur au sens de LSST, qu’il effectue ses tâches à la demande de son employeur, qu’il appréhendait un danger de contamination à la Covid-19 et que le fait de demander d’être assigné à un autre poste ne mettait pas la sécurité d’autrui en danger immédiat. Elle conclut cependant que le plaignant n’a pas rencontré son fardeau à l’égard des autres critères.
D’abord, analysant la situation en fonction de l’appréhension que pourrait avoir une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances, la CNESST estime que le plaignant n’a pas démontré que ses appréhensions étaient fondées sur des motifs raisonnables. Effectivement, le plaignant était informé des mesures sanitaires mises en place par l’employeur afin de prévenir la contamination et assurer la sécurité des travailleurs. Parmi ces mesures, nous comptons la prise de température corporelle, en plus des équipements de protection individuelle (EPI) fournis par l’employeur pouvant être changés au besoin. Ces mesures ont été considérées comme suffisantes par la CNÉESST dans les circonstances.
Par ailleurs, la CNÉSST soutient que le plaignant n’a pas réussi à démontrer que son droit de refus découle d’un travail dont les conditions sont anormales. La pandémie de la Covid-19 a affecté tous les aspects de la vie, que ce soit au travail ou dans la vie personnelle de chacun. Ainsi, les conditions de travail ou circonstances d’exécution n’étaient pas anormales dans les circonstances, d’autant plus que l’employeur avait adopté des mesures sanitaires de prévention adéquates et recommandées par la direction de la santé publique.
La CNÉSST détermine donc que la plainte du plaignant est non fondée et irrecevable, puisque ce dernier n’a pas exercé de droit de refus selon les critères de la LSST.
Laine et Recettes Cook it inc., 2020 QCCNESST 203