Les faits
La plaignante travaillait pour l’employeur comme préposée aux bénéficiaires à temps plein.
À partir d’avril 2013, elle s’absente en invalidité et en gardera des limitations fonctionnelles qui l’empêcheront de reprendre son poste de préposée aux bénéficiaires.
En 2015, lorsqu’elle sera apte à revenir au travail, une rencontre sera organisée entre l’employeur, la plaignante et le syndicat afin d’évaluer les possibilités d’accommodement. Les parties identifient le poste d’agente administrative comme étant un poste convenable pour madame et elle obtiendra un poste d’agente administrative de quatre (4) jours par semaine, de nuit, en priorité sur d’autres salariés.
Un an plus tard, alors que l’employeur affiche un poste d’agente administrative de cinq (5) jours par semaine, de jour, la salariée manifeste son insatisfaction avec le poste octroyé, qui est de nuit et à temps partiel et demande à l’employeur de lui accorder ce nouveau poste comme mesure d’accommodement, et ce, même si elle ne détient pas l’ancienneté pour obtenir le poste conformément à la convention collective.
L’employeur refuse de lui octroyer ce nouveau poste puisque selon lui, comme la plaignante n’a pas subi un nouveau handicap, elle n’a pas le droit d’obtenir un nouvel accommodement. L’employeur va donc octroyer le poste à la salariée qui y a droit conformément aux dispositions applicables de la convention collective en matière de mutations volontaires.
La plaignante, insatisfaite du dénouement de cette affaire, a donc formulé plusieurs griefs pour contester la décision de son employeur.
La décision
Lors de l’audience, l’employeur allègue qu’il s’est acquitté de son obligation d’accommodement à l’endroit de la plaignante. En effet, il rappelle qu’il n’existe aucune obligation pour un employeur de trouver une solution parfaite pour un employé et que toutes les parties doivent faire des compromis. D’ailleurs, l’obligation d’accommodement est une obligation de moyen et non de résultat et donc, une fois que les parties se sont entendues sur un accommodement raisonnable, l’employeur s’est acquitté de son obligation.
De plus, toujours selon l’employeur, si l’obligation d’accommodement se poursuit malgré le fait que les parties aient identifié un accommodement raisonnable et alors qu’il ne pourrait jamais fermer un dossier d’accommodement et aurait l’obligation de refaire des ententes d’accommodement à chaque fois qu’un poste plus intéressant se libérait, ce qui constituerait clairement une contrainte excessive puisqu’il emploie plus de 10 000 personnes.
Pour l’arbitre, la question n’est pas de savoir si madame avait droit à un nouvel accommodement, mais plutôt si l’obligation d’accommodement cesse dès qu’une personne salariée est replacée dans un autre poste.
En s’appuyant notamment sur les dispositions de la convention collective qui traitent de « postes réservés », l’arbitre est d’avis que l’obligation d’accommodement de l’employeur n’est pas fixe et pourrait produire des effets futurs qui imposeront aux parties d’examiner les postes parmi ceux qui deviennent disponibles dans le CIUSSS, et ce, jusqu’à ce qu’on trouve l’accommodement « parfait » ou l’accommodement qui permet à la personne salariée de recouvrer son salaire hebdomadaire antérieur. La seule limite à cette obligation est la démonstration d’une contrainte excessive, ce que l’employeur n’a pas démontré en l’espèce, selon les motifs retenus par l’arbitre.
De fait, l’arbitre retient premièrement que le nombre de cas qui donnent lieu à des accommodements chez l’employeur est faible. Or, il faut qu’il y ait eu un accommodement initial, imparfait, pour que l’obligation subsiste. Ensuite, l’arbitre est d’avis qu’il y a vraisemblablement des personnes salariées accommodées imparfaitement qui seront satisfaites de la solution retenue et, finalement, il faut encore qu’un poste se libère et que la personne réponde aux exigences de la tâche pour qu’il soit possible de compléter le processus d’accommodement. Selon l’arbitre : « Il ne paraît pas avoir là de quoi occuper beaucoup de personnes aux ressources humaines. »
Le Tribunal conclut donc que la revendication de la plaignante était bien fondée et, alors que l’employeur devra octroyer le poste d’agente administrative, cinq (5) jours par semaine, de jour, à la plaignante malgré le fait que d’autres candidats possédaient une ancienneté plus grande.
À suivre…
Un pourvoi en contrôle judiciaire a été demandé.
Syndicat des travailleuses et travailleurs de la santé et des services sociaux de l’Outaouais (CSN) et Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Outaouais, 2019 QCTA 432.