Cette sentence arbitrale interlocutoire statue sur une demande de précisions déposée par le syndicat. Pour rendre sa décision, l’arbitre devait se prononcer sur la suffisance des motifs invoqués par l’employeur dans sa lettre de congédiement.
Les faits
Avant sa fin d’emploi, le plaignant occupait un poste d’infirmier auxiliaire dans un Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux « CIUSSS ». Il a été congédié parce que l’employeur lui reprochait d’avoir adopté, à différentes occasions, un comportement inadéquat tant envers les bénéficiaires qu’envers ses collègues de travail.
Dans le cadre du grief, l’employeur a répondu à une première demande de précisions du syndicat en lui transmettant une « Lettre de congédiement bonifiée ». Dans cette lettre, l’employeur a ajouté des dates et certains incidents qui ont mené à la fin d’emploi.
Le syndicat est insatisfait de ces ajouts. Une seconde demande de précisions est déposée, par laquelle il requiert que l’employeur lui fournisse d’autres informations qu’il estime essentielles.
Le syndicat cherche notamment à connaître des dates additionnelles, ainsi que l’identité des bénéficiaires et des collègues impliqués dans les évènements allégués dans la lettre de congédiement.
L’employeur ayant refusé de fournir des spécifications supplémentaires, le syndicat saisit un arbitre de cette question.
La décision
L’arbitre François Hamelin rejette la seconde demande de précisions du syndicat.
Ce dernier mentionne que dans le cadre d’un grief de congédiement, l’employeur est tenu de respecter les principes d’équité procédurale, c’est-à-dire qu’il doit transmettre suffisamment d’informations au plaignant afin de lui permettre de préparer de façon intelligente sa défense.
Or, comme le souligne l’arbitre, il faut éviter de confondre l’équité procédurale applicable aux dossiers de congédiements et la notion de « droit à une défense pleine et entière », laquelle est propre au droit criminel.
En effet, en matière de congédiement, il n’est pas nécessaire de préciser tous les détails des circonstances ayant mené à la fin d’emploi, pas plus qu’il n’est nécessaire de communiquer l’entièreté de la preuve détenue par l’employeur (à moins de disposition contraire prévue à la convention collective).
Il suffit de communiquer suffisamment d’informations pour que le salarié soit informé des motifs sur lesquels l’employeur fonde sa décision de mettre un terme à son emploi et ce, afin de lui permettre de se préparer adéquatement et intelligemment en prévision de l’audience.
En l’espèce, dans sa lettre de congédiement, l’employeur reproche au plaignant huit (8) gestes, comportements et/ou attitudes adoptés envers les bénéficiaires. L’employeur signale également six (6) évènements concernant les relations du plaignant avec ses collègues de travail.
L’arbitre estime que toutes les fautes reprochées au plaignant se sont produites dans des circonstances tellement particulières, inattendues et inhabituelles, qu’il est impossible que le plaignant ne sache pas à quoi l’employeur fait référence.
En somme, l’arbitre conclut que le plaignant dispose de suffisamment d’informations pour se préparer intelligemment à l’arbitrage. Il n’est donc pas nécessaire d’identifier les bénéficiaires et/ou les collègues de travail concernés par les allégations.
Quant aux reproches plus généraux, l’arbitre juge qu’ils sont suffisamment précis et que l’employeur n’est pas tenu d’identifier toutes les dates où le comportement chronique du salarié s’est manifesté.
référence : CIUSSS de la Mauricie et du Centre-du-Québec et Syndicat des professionnelles en soins de la Mauricie et du Centre-du-Québec (FIQ) (Simon St-Pierre), 2018 QCTA 354