Dans l’affaire Syndicat des travailleurs de la Buanderie Centrale de Montréal inc. (CSN) et Buanderie Centrale de Montréal inc., le Tribunal administratif du travail a déterminé que l’employeur n’a pas décrété un lock-out illégal en refusant de laisser des salariés retourner au travail après leur pause, en portant une casquette en protestation des mesures d’austérité gouvernementales selon un mot d’ordre syndical.
Le Tribunal a, au contraire, retenu les prétentions de l’employeur selon lesquelles le refus concerté des salariés de retourner au travail sans leur casquette constituait plutôt une grève illégale.
Les faits
Le port de la casquette s’est présenté à deux occasions, et ce, en pleine période d’application de la convention collective, alors que les parties ne peuvent recourir ni à la grève, ni au lock-out.
L’employeur a justifié sa décision d’en interdire le port pour deux motifs.
D’abord, le texte de la convention collective prévoyait le port obligatoire d’un uniforme. En outre, au moment des incidents, les représentants patronaux ont jugé que le port de la casquette présentait un danger potentiel, particulièrement en raison des convoyeurs aériens et des activités se passant au-dessus de la tête des salariés dans l’usine.
L’employeur n’a imposé aucune mesure disciplinaire aux salariés qui n’ont pas obtempéré à l’ordre de retirer leur casquette.
Toutefois, il a procédé à des coupures de salaire correspondant à leur temps non travaillé, ce que plusieurs des salariés concernés ont perçu comme des mesures de représailles.
La décision
À l’examen de l’ensemble des faits, le juge administratif conclut que la décision de l’employeur ne reposait pas sur un agir “anti-syndical”.
En effet et bien qu’un rapport d’expert, rendu après les incidents en cause, ait évalué que le port de la casquette dans l’usine n’exposait pas les salariés à des risques additionnels d’accidents de travail, il était tout à fait légitime de la part des représentants patronaux d’appréhender de tels risques.
Le juge retient également que « cet ordre d’enlever les casquettes, fût-il illégal, n’était pas susceptible de cause un tort irréparable aux salariés » et ne portait pas atteinte à leurs droits fondamentaux.
En conséquence, les salariés étaient tenus de s’y conformer et de fournir leur prestation de travail, tout en demeurant libres de s’en plaindre ensuite conformément à la règle « work now, grieve later ».
Dans ce contexte, leur refus d’obtempérer constituait une grève illégale :
« [29] Enfin, ce n’est pas parce qu’on reste sur place à scander qu’on veut travailler qu’une grève change de nature intrinsèque pour devenir un lock-out, cela devrait aller de soi. En l’occurrence, c’est bel et bien à un refus concerté de fournir sa prestation de travail, donc à une grève, que [l’Employeur] a été confrontée à deux reprises. Puisque la théorie de cause du Syndicat repose essentiellement sur l’illégalité de ces prétendus lock-out, sa plainte doit être rejetée. Il en va de même des plaintes individuelles, puisque le fait que certains salariés n’aient pas été rémunérés pour les heures qu’ils n’ont pas travaillé découle logiquement de leur participation à un arrêt de travail illégal. »
Référence : Syndicat des travailleurs de la Buanderie Centrale de Montréal inc. (CSN) et Buanderie Centrale de Montréal inc., 2016 QCTAT 609.